Le moment de la naissance s'inscrit dans le passage lent et complexe de l'accouchement.
"Tu enfanteras dans la douleur" tend à démontrer la théorie de la douleur salvatrice, de la nécessité de la souffrance pour respecter le mythe unitaire de la séparation.
Pour les uns, il s'agit d'un trumatisme grave, d'un moment particulièrement dramatique dans le mouvement de la vie. Il faut quitter le paradis amniotique, le bonheur utérin, pour pénétrer dans un monde inconnu, hostile, meurtrier. La coupure du cordon ombilical, traduit par le premier cri, signifie l'entrée dans le monde des signifiants.
C'est une malédiction primordiale qu'on tentera d'exorciser en refaisant en sens inverse, de toutes les manières possibles et imaginables, réalistes et imaginaires, concrètes et symboliques, le chemin qui nous sépara et nous éloigna du cher, du merveilleux, de l'édénique utérus maternel. Consacrerons-nous toute notre vie à cette régression thalassale ? Ne quittons-nous pas plutôt l'obscurité, l'humidité, la passivité, pour découvrir l'activité, la lumière ?
Lorsque l'enfant est né, une part de nous-même, sans être nous-même, est abandonnée ; il serait intéressant de s'en préoccuper. En effet, cette galette nourricière - placenta en termes scientifiques - que l'on cache, que l'on jette, au nom de quel mépris, de quel dégoût, fut durant neuf mois un organe essentiel, liaison constante avec la mère, avec la vie, communication avec l'extérieur. Son rôle fini, il retourne à la poussière. Il en est de même de l'enveloppe amniotique qui, dans certains rites, peut devenir parchemin séché, objet de culte, en tout cas symbole de la vie et enveloppe éphémère d'une protection temporelle.
Le moment de la naissance est, sur le plan symbolique, un moment privilégié ; c'est un carrefour d'émotions dont la multiplicité nous échappe parfois, lieu de réminiscences où l'affectif se dévoile dans toute son ambivalence. C'est le point culminant de la création. Nous revivons, par cet isntant, notre propre naissance. Il en est de même pour les témoins, co-acteurs attentifs de cet événement qui, partageant un lien émotionnel, vivent ainsi leur seconde naissance et les amènent, par miroir, à réfléchir sur leur propre passage. Il est donc particulièrement important que l'acte de naissance se déroule dans un milieu propice, où l'entourage joue un rôle capital. Si l'on combat à toute fin la nécessité de la douleur en tant que salvatrice, il est nécessaire de la concevoir en tant que partage. C'est la communauté qui fait l'individu et, paradoxe, le confie à sa solitude, phase d'initiation la plus proche de ce qui se passe dans l'autres lieux, à l'abri du temps, dans une communauté où le maillon solitaire aura à se forger pour atteindre un jour son état natif de fer, et peut-être pour certains, transmutés, devenir or.
Bonjour, de qui ce magnifique tableau ? Merci d'assouvir ma soif inextinguible de culture ...
Rédigé par : Dominique | 11 février 2010 à 08:05
Gustav Klimt, peintre autrichien, symboliste, fin XIXe siècle.
Rédigé par : L'éphéméride de Caritate Libertine | 11 février 2010 à 08:59
Pour tous ceux que l'histoire des rites de conception et de naissance intéressent, je vous conseille le livre de Jacques Gélis, L'arbre et le fruit; naissance dans l'occident moderne XVIè-XIXè siècle paru chez Fayard. Notre hôtesse y rencontrera des saints aussi improbables que Saint Foutin ou Saint Guerlichon.
Ceux qui s'intéressent à d'autres croyances liront Le mythe de la procréation à l'âge baroque de Pierre Darmon paru dans la collection Points-histoire du Seuil. On y lira avec intérêt comment les hommes croyaient que certains vents pouvaient rendre leur femme enceinte durant leurs voyages.
Rédigé par : Le Nain | 11 février 2010 à 10:07
Vive le dieu Priape ! et saint Guignole...
Rédigé par : Caritate | 11 février 2010 à 11:31
Klimt, bien sûr je reconnais un peu maintenant !
Comme quoi l'Autriche n'a pas eu que des peintres ratés.
Hélas il y en eu un de trop ...
Rédigé par : Dominique | 11 février 2010 à 13:04
Peut-être que s'il avait réussi dans la peinture... Mais ne rêvons pas
Rédigé par : Caritate | 11 février 2010 à 15:26