Don Diègue : Rodrigue, as-tu du coeur ?
Don Rodrigue : Tout autre que mon père l'éprouverait sur l'heure.
Don Diègue : Agréable colère ! Digne ressentiment à ma douleur bien doux ! Je reconnais mon sang à ce noble courroux. Ma jeunesse revit en cette ardeur si prompte. Viens, mon fils, viens, mon sang, viens réparer ma honte. Viens me venger.
Don Rodrigue : De quoi ?
Don Diègue : D'un affront si cruel qu'à l'honneur de tous deux il porte un coup mortel : d'un soufflet. L'insolent en eût perdu la vie ; mais mon âge a trompé ma généreuse envie ; et ce fer que mon bras ne peut plus soutenir, je le remets au tien pour venger et punir. Va contre un arrogant éprouver ton courage : ce n'est que dans le sang qu'on lave un tel outrage ; meurs ou tue. Au surplus, pour ne te point flatter, je te donne à combattre un homme à redouter ; je l'ai vu, tout couvert de sang et de poussière, porter partout l'effroi dans une armée entière. J'ai vu par sa valeur cent escadrons rompus ; et pour t'en dire encore quelque chose de plus, plus que brave soldat, plus que grand cappitaine, c'est...
Don Rodrigue : De grâce, achevez.
Don Diègue : Le père de Chimène.
[Corneille, Le Cid, acte I, scène 5]
Il paraît que certains confondent ces répliques avec celles-ci :
Panisse : Allons, César, je t'ai fait de la peine ?
César : Quand tu me parles sur ce ton, quand tu m'esponches comme si j'étais un scélérat... Je ne dis pas que je vais pleurer, non, mais moralement, tu me fendsle coeur.
Panisse : Allons, César, ne prends pas ça au tragique !
César : C'est peut-être que, sans en avoir l'air, je suis trop sentimental. (à Escartefigue) A moi, il me fend le coeur. Et à toi, il ne te fait rien ?
Escartefigue : Moi, il ne m'a rien dit.
César : Ô Bonne Mère ! Vous entendez ça ?
Panisse : Est-ce que tu me prends pour un imbécile ? Tu as dit : "Il nous fend le coeur" pour faire comprendre que je coupe à coeur. Et alors, il joue coeur, parbleu !
[Pagnol, Marius, La partie de cartes, scène 1]
Le coeur est une source inépuisable d'inspiration, même chez les chansonniers :
"Méfiez-vous des gens dont on dit qu'ils ont le coeur sur la main. Comme ce n'est pas sa place, demandez-vous ce qu'ils peuvent bien avoir à la place du coeur." [Pierre-Jean Vaillard]
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