Aron, Barre, Boudon, Depardon, Devos, Domenech, Forni, Kopa, Loewy, Pellegrin, Peynet, Poincaré, Queneau, Radiguet… Pardon à tous les Raymond connus et inconnus que je ne cite pas. Aujourd’hui, j’ai envie de retenir Raymond Poulidor, l’éternel second. Second, alors qu’il faudrait en toute logique grammaticale dire deuxième. Second ne s’emploie que lorsqu’il y a deux et seulement deux termes, deux personnes… : le premier et le second. Le premier surveillant et le second surveillant, parce que je ne connais pas de troisième surveillant, à moins que… ! Au-delà de deux, on emploie : deuxième, troisième… énième. Oui, je sais, c’est loin l’école ! Ce règle révisée et re-révisée, pourquoi qualifier Poupou d’éternel second ? A cause de la concurrence entre le maillot jaune et lui, les autres coureurs sont gommés, ils n’ont plus d’existence, seul compte le duel entre les deux hommes. Grammaticalement, le terme est impropre, mais psychologiquement, c’est une autre affaire ! Mais je vous parle là du tour de France d’une époque reculée où le cyclisme était un sport, excusez-moi de cette incongruité ! Entre le premier et le second, une rivalité s’instaure. Et la jalousie aussi, parfois, de l’un envers l’autre, ou vice versa. Voyez une fratrie, il y a l’aîné et le puiné, tels Caïn et Abel… vous savez ce qu’il advint. Être le deuxième engendre souvent une frustration. À l’école, le premier de la classe est admiré, félicité ; et l’autre, juste derrière, qui rame, peut mieux faire, à un demi-point près, c’est ballot ! Vous êtes le second du patron ? comme qui dirait son bras droit ? vous aspirez à prendre sa place. À lui les honneurs en cas de réussite, à vous la responsabilité de l’échec ! Dans les pays d’Afrique où la polygamie est autorisée, la deuxième épouse est appelée le deuxième bureau ; c’est jolie comme expression. Vue de chez nous Occidentaux, il semblerait que ce genre de situation soit bien acceptée par les femmes africaines ; nous, comment pourrions-nous tolérer cela ? On a souvent de la sympathie pour le second, on comprend que sa situation n’est pas toujours confortable. Mais qu’en est-il des premiers ? Nous admirons le premier à avoir fait une découverte, le premier à avoir réussi tel ou tel exploit sportif, même si nous savons qu’ils ne resteront pas premiers bien longtemps, que se succéderont d’autres découvertes, d’autres exploits. Nous envions aussi les têtes, les chefs, de bandes, d’entreprise…, ignorant qu’ils se sentent parfois incompris et solitaires. Qui n’a pas rêvé un jour d’être le premier, ou la première, en quelque chose ? Tous les stades de la vie sont à même de déclencher ce genre de désir : dans le cœur de ses parents, sur les bancs de l’école, lors des premiers jeux sexuels, au sortir d’une grande école (ah, sortir major de sa promo !), puis dans la vie professionnelle, politique (pour ceux que ça intéresse). Être en haut de l’affiche, être au milieu sur la photo – il y en a un à qui cela n’a pas réussi, il était au milieu, mais sur la croix ! Il y a les premiers dans le temps, qui n’auront qu’un temps. Il y a les premiers parce que meilleurs, plus puissants, plus forts… jusqu’à ce qu’un plus plus arrive pour les supplanter. Alors second ou premier, même galère ? même insatisfaction ? même frustration ? Mais alors, on veut quoi ? Être le/la seul(e), l’unique, l’irremplaçable, le/la jamais égalé(e). Rayez tous les individus de la terre, ne gardez que moi, moi, moi et encore moi. Seule(e) sur Le Dernier Rivage… J’accepterais juste une compagnie, une seule, mais alors triée sur le volet, pas n’importe quel péquin qui passerait par là pour me sortir de ma solitude. Non, quelqu’un qui, comme moi, aurait toutes les qualités, comme au Paradis, avant la pomme, avant le ver dans le fruit ; je serais son Eve, il serait mon Adam… merde, y’a eu Lilith avant ! Un jour je f’r’rai cul-de-jatte ou bonne sœur ou pendu, enfin un d’ces machins où je n’s’rai jamais plus, le suivant, le suivant !
Sur l’air de La Dame patronnesse (Jacques Brel)
Pour faire un bon saint de Bretagne
Lorsque l’on est natif de Platz
Il faut prêcher le célibat
Et ne pas avoir de compagne (bis)
Refrain :
Et un point à l’envers
Et un point à l’endroit
Un point pour saint Tiphaine
Un point pour saint Melaine
Pour faire un bon saint de Bretagne
Au concile d’Orléans aller
Te faire l’avocat des cités
Surtout si Clovis t’accompagne (bis)
(Refrain)
Pour faire un bon saint de Bretagne
Il faut savoir faire des miracles
Même si cela tient du spectacle
Puis aller vivre à la campagne (bis)
(Refrain)
Pour faire un bon saint de Bretagne
Melaine, tu mettras ton dernier manteau
Pour être inhumé au Champ du repos
C’est presque un pays de cocagne (bis)
(Refrain)
Par un effet du hasard - le jour de la St-Edouard n'est pas terminé - France 2 nous offre ce documentaire exceptionnel, Rendez-vous en terre inconnue. Frédéric Lopez a emmené Edouard Baer au coeur du pays dogon, au Mali. De la sensibilité, de la profondeur, de l'humanité, dans l'oeil d'un Parisien sophistiqué que nous avons coutume de voir sous d'autres traits. Ceux qui connaissent Edouard Baer ne sont pas étonnés ; je souhaite aux autres d'acquérir la conviction que la rédemption est possible.
Odilon Redon, peintre symboliste de la fin du XIXe siècle, spirituellement apatride, rêveur, contemplatif, coloriste hors-pair.
" L'artiste vient à la vie pour un accomplissement qui est mystérieux. Il est un accident. Rien ne l'attend dans le monde social."
... Epiphanie, la manifestation.
Venus d'Orient, trois rois se mirent en route en suivant la lumière de l'étoile qui les guida jusqu'à Bethléem,où venait de naître, dans une étable, l'enfant Jésus. L'Epiphanie commémore l'histoire de ces trois rois mages : Melchior, à la peau blanche, apporte de l'or, symbole royal ; Balthazar, à la peau cuivrée, apporte de la myrrhe, symbole sacerdotal ; Gaspard, à la peau foncée, apporte l'encens, symbole prophétique. Un conte de Noël prétend qu'il y aurait eu un quatrième roi mage, Artaban, qui apportait des pierres précieuses mais qui les donna à des pauvres rencontrés en chemin. N'étant jamais parvenu à Bethléem, on ne parla plus de lui, et il ne fit pas le fier, Artaban !
Ainsi est née la légende de l'Epiphanie, et celle de la couronne des rois, avec sa fève. Sa F'Eve ? Comme celle d'Odilon Redon ? On dirait une blague, n'est-ce pas ? Et pourtant... Eve est la matrice de la vie, elle représente la fécondation. La fève est d'abord une graine, puis elle se développe, devient une plante ; elle commence un cycle, tout comme la naissance de l'enfant divin est un commencement. Elle arrive à maturation, conjuguant les effets de l'eau et du soleil. Séchée, réduite en poudre, elle devient farine et fait le pain. Le pain qui sert à élire les rois. Lors du partage de la couronne, on peut devenir roi si l'on trouve la fève... et ainsi choisir sa reine. Un seul y parviendra ; les autres devront continuer leur recherche. Celui-là trouve son Eve et réintègre son androgynie. Mais le F, me direz-vous ? Il est la clé qui pénètre dans la serrure pour la faire tourner, la clé qui ouvre la boîte de Pandore, et indique que, derrière la porte, se trouve le chemin de la vérité. Je vous souhaite donc la fève !
Geneviève veillant sur Paris, par Puvis de Chavanne.
C’est bizarre, ce qualificatif « saint » employé au féminin., n’est-ce pas, messieurs les misogynes ? Pour ne pas vous faire honte, je ne choisis pas aujourd’hui de vous parler d’une personne, même si une vierge* chrétienne porta ce nom au IVe siècle, patronne de Lutèce qui, par ses prières, aurait détourné les armées d’Attila (Huns ?, dirait un mauvais imitateur de l’accent ch’ti). Ces Huns furent vaincus aux champs Catalauniques, ce qui inspira Musset à ces deux vers célèbres : « Les champs catalauniques sont les champs les plus beaux et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots. » Oui, je revisite les poètes en ce moment, je ne sais pourquoi, l’effet nouvelle année peut-être ? les étoiles scintillantes dans le ciel glacé ? la lune montante, la menteuse qui dessine un C inversé alors qu’elle est croissante ? Mais je m’égare, je m’égare.
Non, je vous parlerai du Panthéon. Construit au XVIIIe par Soufflot (puis Rondelet) selon le vœu de Louis XV, sur la montagne Sainte-Geneviève, à l’emplacement de l’ancienne abbaye du même nom, ce monument eut d’abord la forme d’une église aux proportions monumentales, au péristyle de colonnes corinthiennes, surmonté d’un fronton triangulaire. Enfin, il y éleva un dôme, et le Panthéon était né. Aujourd’hui, après moultes décorations successives (drapeaux, statues…), il présente cette particularité d’être un édifice républicain surmonté d’une croix chrétienne ! … et d’un paratonnerre (pour attirer les foudres de Dieu ?)
L’inscription Aux grands hommes, la Patrie reconnaissante a été prise jusqu’ici au pied de la lettre. Seules deux femmes y reposent ad vitam : la première, Sophie Berthelot, y fut admise pour qu'elle ne soit pas séparée de son mari (comme c’est beau l’amour), le chimiste Marcellin Berthelot ; la seconde est Marie Curie, deux fois prix Nobel. Oui on peut, à l’instar de la cinéaste féministe Denise Brial, qualifier le Panthéon de « tombeau du patriarcat ». Pourtant, de nombreuses femmes seraient panthéonisables ; moi j’ai une préférence toute particulière pour Olympe de Gouges, Hildegarde de Bingen et Louise Michel… et aussi Jeanne d’Arc (paix à ses cendres, quoique certaines théories avancent qu’elle aurait fini ses jours tranquillement en Lorraine, et je serais assez tentée d’y croire !) Alors quand ? Je parlais de misogynie au début de ce billet, non ?
* Une petite fille très très jeune et très très laide !
Basile Valentin - son nom veut dit « régule » (puissant), dénomination du mercure en alchimie - est un alchimiste du XVe siècle, qui aurait vécu dans un couvent de Bénédictins à Erfurt. A la recherche de la pierre philosophale, il a fait des découvertes utiles et est considéré comme l’un des fondateurs de la chimie et de la pharmacie (il employa l’antimoine comme médicament), Cependant, on n’a aucune certitude sur son existence réelle, et les ouvrages qu’on lui attribue, écrits en allemand et traduits en latin et dans plusieurs langues vulgaires, ont peut-être été écrits par divers alchimistes ; ils sont du plus haut intérêt car ils expriment la conception la plus gnostique de l’alchimie et décrivent des corps chimiques nouveaux et l’utilisation de procédés (baguette divinatoire) pour découvrir les métaux cachés au sein de la terre : De la nature des métaux, Le Macrocosme, Le Char triomphal de l'antimoine… Le plus connu restant Les Douze Clefs de la philosophie (http://hdelboy.club.fr/emblemes.htm/) Pour saint Valentin, on verra en son temps, mais vous les amoureux, vous pouvez d'ores et déjà penser aux cadeaux que vous voulez offrir... ou recevoir.
anarcho-agnostique et idéaliste pessimiste... et cyclothymique
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